Etant invitée sur France Bleu dans l’émission “les experts” le 30 avril , Patricia Darré et Manuel Bonnefond m’avaient demandé d’aborder “le couple et le divorce”.
https://www.francebleu.fr/emissions/les-experts/berry/les-experts-de-france-bleu-berry-52
Je vous propose d’approfondir et d’élargir le contenu de cette émission dans cet article si cela vous intéresse.
Le divorce
Même si la loi l’autorisait depuis 17921 seulement 1% des couples divorçaient en 1950. Les couples étaient un peu emmurés dans leur fonctionnement. La révolution (notamment sexuelle) de 1968 a libéré les mœurs, puis les lois concernant la contraception et l’IVG ont également influencé les états d’esprits.
Aujourd’hui 350 divorces sont prononcés par jour en France ! La progression est constante, il y a 4 fois plus de divorces aujourd’hui qu’en 1970.
L’infidélité est la première cause des divorces, mais pas la seule puisque l’égoïsme du partenaire en est la seconde, puis le mauvais caractère, les comportements abusifs et les désaccords concernant l’avenir.
Contrairement au passé, dans les 3/4 des cas ce sont les femmes qui demandent le divorce aujourd’hui : la naissance plus tardive du premier enfant (en moyenne à 31 ans), l’accès au travail les a rendues plus indépendantes : dans 80% des situations elles obtiennent la garde des enfants. Les hommes divorcés ont en moyenne 42 ans et les femmes divorcées 44 ans.
Conséquence de cela : plus de 1,6 millions d’enfants vivent aujourd’hui dans des familles recomposées : Près de 8% des familles françaises sont des familles recomposées.
Et pourtant, même si le nombre de mariages a considérablement diminué, même si les statistiques montrent que 45% des couples divorcent : 2 couples se marient toutes les 3 minutes en France2 : c’est notable !
Et c’est, sans parler des couples qui se pacsent ( en mairie maintenant) ou qui s’installent en concubinage (sans formalité) . Couples qui se font et se défont de la même manière, bien, que les statistiques ne soient pas si simples à réaliser que pour les couples mariés.
Aujourd’hui les formes de couples sont d’une grande variété :
Cela va du couple orthonormé, reconnu et identifiable (avec au sans enfant ) aux nouveaux couples: comme les couples qui font appart’ à part –plus d’1 million de couples ne partagent pas le même toit ( 8 % font chambre à part )- ou ceux qui pratiquent le staching c’est à dire qu’ils sont en couple mais ne le disent à personne : ni à leur famille ni à leurs amis ni sur les réseaux sociaux, aux couples (nombre infime) échangistes ( pratiquant par exemple le poly-amory grâce notamment à l’impact des réseaux sociaux) voire aux couples qui restent ensemble pour les enfants mais qui n’ont plus de vie conjugale commune. L’anthropologue Philippe Brenot dit que l’on assiste à une crise du couple, que la sexualité est aujourd’hui distinguée du couple, que la culture de l’individualisme et de l’idyllique pousse des personnes à favoriser leur vie d’homme ou de femme. Le couple est pour lui l’école de l’altérité (apprendre l’autre) et de l’humanité : accepter l’autre tel qu’il est et non tel que l’on voudrait qu’il soit ! L’amour c’est merveilleux mais aussi douloureux.
Le pardon peut-être une chance dans un couple.
Les conflits
Une vie de couple n’est pas linéaire et la crise est inhérente à son déroulé. Après une crise, soit le lien amoureux est re-tisser, parfois même consolidé, soit, si les conflits et les crises s’accumulent et que la désillusion s’installe, le lien peut se rompre.
Les causes des conflits sont le plus souvent : l’influence familiale, la jalousie, le mensonge, la désillusion, le malentendu, la fierté, l’orgueil, la différence de point de vue (éducation), les relations sexuelles ou les problèmes de communication. Ce qu’il faut c’est comprendre le sens du conflit, et éviter de les aggraver en voulant toujours avoir raison, et en les niant 4 .
Les conflits ont des conséquences sur les conjoints et sur les enfants :
Chez les conjoints s’installent : la méfiance, le manque de confiance, l’isolement (vivre comme des étrangers, et ne plus rien avoir à se dire), la perte de confiance en soi (difficulté pour s’exprimer, pour agir …) en l’autre !
L’agressivité peut prendre le pas sur la communication et peut entraîner des violences.
Des réactions découlent de ces conséquences : refuge dans le travail, infidélité, dépression, dépendance (boire), abandon du foyer, divorce, suicide ; meurtre, ( tous les 3 jours 1 femme meurt sous les coups/ 1 homme toutes les 3 semaines : tel : 3919 ) !
Sur les enfants les conflits non réglés entraînent de la peur, des problèmes scolaires, des troubles psychologiques, de la rébellion, parfois des fugues, ou une certaine délinquance !
Heureusement toutes les séparations ne se passent pas si catastrophiquement que cela.
Même si au vu du nombre, la séparation de couple s’est banalisée sur le plan social, elle est souvent vécue de façon dramatique sur le plan individuel : c’est la perte d’une personne précieuse qui était source de bonheur (la plus part du temps) et la séparation laisse un grand vide : elle donne la sensation d’un plus ou moins brutal déséquilibre.
La séparation ne signifie pas la fin de l’histoire du couple, surtout s’il y a des enfants. Depuis 1987 la loi Malhuret , dissocie « couple parental » et « couple conjugal », en posant que le divorce dissout seulement le second. A ce titre, l’enfant prend une place spécifique chez chacun de ses parents qu’il doit dorénavant différencier distinctement .
L’aide d’un professionnel peut faciliter cette réorganisation compliquée. Parfois l’ enfant culpabilise et pense qu’il est l’origine du conflit et de la séparation. Il a besoin d’avoir des explications claires sur les bouleversements de sa vie qui bascule. Explications qui le concernent c’est à dire le préserver de tout ce qui ne le concerne pas (intimité conjugale ou infidélité par exemple). Il n’est pas facile pour un enfant d’entendre “ça ne va rien changer pour toi”, car, si cela va déséquilibrer son quotidien. Se faire accompagner donc , par des professionnels mais aussi par ses proches peut aider l’enfant à traverser cette période avec moins d’incidences. Parfois c’est l’occasion de retisser des liens dans sa propre famille. (voir le film : Mistral gagnant).
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En amont on peut se demander : Qu’est-ce qui fait que des personnes se mettent en couple ?
Faire couple c’est faire alliance : c’est avoir des sentiments l’un pour l’autre et surtout se lier pour un intérêt commun. Se retrouver en duo mérite que l’on prenne un peu de temps pour se comprendre.
Un couple est toujours situé dans un contexte : qu’il soit socio-économique, culturel, cultuel ou moral4. Etudier ce contexte est précieux car l’on peut mesurer des choses évidentes à côté desquelles on passe souvent.
Et les différences ne sont pas des freins dans la relation de couple : bien au contraire. Établir une culture des différences est essentielle car la personnalité individuelle va exister et enrichir l’identité du couple.. Il faut néanmoins bien se connaitre, savoir pour l’autre et pour soi ce qui négociable de ce qui ne l’est pas, apprendre à inventer des compromis (donner/recevoir), savoir faire front commun : un couple ça se construit ça évolue ça grandit.
L’autre richesse du couple c’est l’échange la communication qui est le terreau essentiel de l’équilibre du couple, et cette communication s’étend du quotidien à la compatibilité intime que deux personnes ont l’une pour l’autre. Pour rappel la communication ne passe par les mots qu’à hauteur d’environ 10% : tout le reste est du non verbal !
Il y a autant de couples que de personnalités qui les fondent : complicité, confiance, fidélité, solidarité sont les piliers de cette union.
Ce qui peut permettre la durée d’un couple c’est de se re-rencontrer. Même si l’on se met en couple beaucoup plus tardivement avec l’allongement de la durée de vie le couple a besoin, régulièrement de se réinventer !
Je reviendrai sur les fondements du couple lors de prochaines interventions.
Merci pour votre lecture et vos réactions qui sont toujours appréciables.
Sylvie Etiève
……………………………………………………………………………………………………………………………….Sources :
1 : Depuis le 1er janvier 2017, le nouveau divorce par consentement mutuel est en vigueur.Ce nouveau divorce est un divorce « déjudiciarisé », il convient de le nommer le divorce par consentement mutuel sans juge. https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F10567
1 :http://pointdroit.com/divorce-histoire/
2: https://www.consoglobe.com/
3: Travaux de l’anthropologue Philippe Brenot-Je suis médecin de l’amour écrit par Philippe Brenot (L’esprit du temps)
4 : le couple ifortpsy
* Dessins argiles et infographie de Pierre-Loïs Damien-Etiève
**Design affiche Séraphin Mixtur